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LE SEL DE LA VIE : L'HERITAGE DE FRANCOISE HERITIER

J'ai connu Françoise Héritier récemment, grâce à l'émission télévisée "La Grande Librairie", de François Busnel. J'avais beaucoup apprécié sa façon de parler et de réfléchir.  Née le 15 novembre 1933 à Veauche dans la Loire (France) elle est  morte le 15 novembre 2017 à Paris.

Puis j'ai cherché un livre d'elle à la bibliothèque, son expérience d'anthropologue et d'ethnologue m'intéressait. Cela lui donnait un point de vue distancé sur sa propre vie, qu'à la fois elle vivait et observait. Je revins à la maison avec un petit livre qui me mit l'eau à la bouche  : "Le sel de la vie".  Un livre publié chez Odile Jacob de 87 pages.

J'ai senti qu'avec Françoise Héritier, j'avais rencontré une écrivaine, que je pourrais lire et relire et qui pourrait m'accompagner, comme une amie dans mes petits travaux d'écriture, qu'elle pourrait être une guide.

Les titres sont importants, ils nous attirent, nous séduisent  ou nous rejettent. "Le sel de la vie" m'intrigua tout de suite, et j'entrais dans ce petit livre par quelques mots qui résonnent en moi comme les notes d'un instrument à cordes.

Mais le mieux est de l'écouter parler de son livre et comment il est né, d'en connaître la source, l'élan,  le "terreau" qui ont été ses appuis.

 

 

 

 

Merveilleuse Françoise Héritier. Je goûte ses mots passionnément, et je m'y retrouve.

A lire légèrement et profondément

A lire légèrement et profondément

Certains mots utilisés par Françoise Héritier comme je vous l'ai dit, font sonner des cordes intérieures, très profondes. Si vous avez lu mes précédents articles, vous allez les reconnaître. Ce sont les mots de "grâce", de " légèreté de l'être", de "terreau", de "mouvement".

Le projet de ce livre est de commencer par quelques mots, c'est ce qu'elle appelle "une fantaisie", née au fil de la plume et de l'inspiration.

Par des associations spontanées avec d'autres mots, Françoise Héritier nous invite à parcourir un chemin de "sensations, d'émotions, de petits plaisirs, de grandes joies, de profondes désillusions parfois et même de peines. Mais son esprit se tourne plutôt vers des moments lumineux.

Elle nous dit dans sa préface : "C'est donc une énumération  qui suit, une simple liste, en une longue phrase, qui est venue ainsi toute seule par à-coups, comme un grand monologue murmuré".

Ces mots murmurés pénètrent en nous. Ils sont très précieux, car ils nous invitent à "ne pas nous laisser déposséder par notre vie active, un entourage dévorant, un travail obsédant, des responsabilités multiples accablantes."

Le livre de Françoise Héritier nous propose également de prendre la plume, tout simplement. Ce sera notre atelier d'écriture d'aujourd'hui,ou de tous les jours :  écrire une phrase, en une énumération, comme un  poème en prose en hommage à la vie. cet atelier peut convenir à tous les âges.  5 lignes minimum, une page maximum.

(Voici un petit florilège, dans le désordre, de ces fiorettis souriants et entraînants) : Le continuer, en une seule phrase, séparée par des virgules. C'est un exercice d'écriture savoureux.

- traverser une rivière à gué ou en sautant de pierre en pierre

- écouter ruisseler l'eau d'un torrent

- préparer le thé

- trouver belles les éoliennes

- détester l'atmosphère des soldes

- donner rendez-vous au bout du monde mais dans un lieu très précis (et dans six mois) à quelqu'un qu'on aime et ne pas retrouver l'endroit 

- manger un sandwich dans la rue

- caresser

- être caressé

- embrasser

 

 

 

 

 

 

A vos plumes, j'attends impatiemment de vos nouvelles.

Vous pouvez les envoyer à mon adresse : plauranice@gmail.com

(French, English, Spanish, Italian, even German  accepted)

 

 

 

 

Pour en savoir plus :

Article du Monde du 16 novembre 2017

L'anthropologue Françoise Héritier, femme de combats.

C’est une grande anthro­po­logue, une intellectuelle à la fois discrète, modeste et mondialement reconnue, une femme de courage à la douceur infinie, qui est morte dans la nuit du 14 au 15 novem­­­bre. Atteinte de polychondrite, une maladie rare pour laquelle elle était soignée depuis 1983, Françoise Héritier a succombé à une rupture de l’aorte, à l’hôpital de la Pitié-Salpêtrière, à Paris.

« C’est la plus grande anthropologue de sa génération », témoigne l’africaniste Emmanuel Terray. « Elle a poussé le structuralisme plus loin que Claude Lévi-Strauss ne l’avait fait lui-même », assure l’ethnologue Marc Augé, qui fut son mari pendant vingt ans. « Elle s’est battue avec toute la force de son intelligence pour affirmer les droits des femmes et leur volonté de se débarrasser de cette domination masculine », explique Salvatore D’Onofrio, professeur à l’université de Palerme et membre du Laboratoire d’anthropologie sociale.

Ses champs de recherche sont impressionnants et couvrent aussi bien les rapports entre le masculin et le féminin que la mécanique des liquides corporels, l’inceste que la contraception, la différence que la violence.   (...)

Françoise Héritier, en 1987.
Françoise Héritier, en 1987. Martine Franck / Magnum Photos

Mais Françoise Héritier toucha plus récemment le grand public en publiant Le Sel de la vie (Odile Jacob, 2012), livre au succès immense, grand monologue sur ces ­ « moments fugitifs de grâce » qui composent une vie, relevé précis mais sans préciosité de ses « trésors intimes », « florilège de sensualité » où l’anthropologue devenue écrivaine des bonheurs quotidiens évoque le plaisir de « marcher à contre-courant » ou de « regarder les branches secouées par le vent ». C’est pourquoi Marc Augé, dans un texte à paraître dans un numéro des Cahiers de l’Herne qui sera consacré à Françoise Héritier en 2018 et que Le Monde publie ci-contre, décèle dans cet ouvrage l’empreinte de ce « matérialisme tranquille » qui vient de loin. De sa longue fréquentation des Samo du Burkina, à l’évidence, mais aussi de son enfance.

D’ascendance paysanne – la branche paternelle de la famille est composée d’Auvergnats du Livradois et celle de sa mère est originaire de la Bourgogne du Charolais –, Françoise Héritier est « une enfant de la seconde guerre mondiale », dit-elle dans Une pensée en mouvement (Odile Jacob, 2009), montage d’entretiens retraçant l’itinéraire de la chercheuse.  (...)

Elle aurait préféré passer une licence d’histoire tout court, mais, pour les filles, cette discipline était nécessairement couplée à la géographie. Férue d’égyptologie, elle ignore l’ethnologie. Mais une bande d’étudiants en philosophie l’emmène au Musée de l’homme suivre un séminaire enthousiasmant. C’était celui de Claude Lévi-Strauss. Et ce fut « la révélation de [sa] vie ». Il faut imaginer l’émerveillement de la jeune femme qui ouvrait des yeux « comme des soucoupes » à l’écoute des exposés du « maître » sur le vasu fidjien (le privilège qu’a le neveu utérin sur les biens de son oncle maternel, aux Fidji) ou sur la chasse aux aigles chez les Hidatsa (épreuve en forme de rite de passage au cours de laquelle les jeunes hommes de cette population d’Indiens d’Amérique du Nord devaient prélever sur un aigle vivant des plumes qu’ils arboreraient dans leurs futures coiffes).

 

 

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